lundi 18 mars 2013

Chypre..." ils ont osé "

Silence sur Chypre dans le JT de France 2 : repassez lundi

Peut-être est-ce le début d’un détricotage final, et accéléré, de l’euro. Peut-être pas. Le problème de l’avenir, comme aurait pu dire Pierre Dac, c’est qu’il n’est pas encore advenu. Mais le plan européen de « sauvetage » de Chypre (dont nous vous racontons tous les détails ici) est en tout cas un de ces événements saisissants, dont on pressent immédiatement qu’ils peuvent faire basculer l’Histoire.
Un impôt prélevé brutalement, et pour la première fois, sur les comptes bancaires des déposants, petits et gros, sous pression de la Troïka : sans même se prononcer sur la légitimité, ou non, de cette mesure plus complexe qu’il y paraît, et dont on débat ardemment dans nos forums (un racket ? Un hold-up ? Une mesure finalement plus juste qu’une ponction sur les salaires ?) peut-être qu’il n’en faudra pas davantage pour déclencher au Sud de l’Europe le fameux « bank run ».
Vous savez, cette ruée vers les banques que l’on attend depuis le début de la crise de la dette, comme les Californiens attendent le « Big One », dans un mélange d’anxiété et d’excitation, et qui donnera le signal du sauve-qui-peut général. Bref, pour l’UE, c’est peut-être le vrai commencement de la fin. Et peut-être pas.

Comment informer sans affoler ?

Quoi qu’il en soit, l’événement aura démontré, une fois de plus, la prodigieuse capacité de léthargie du système médiatique français, notamment en période de week-end, à commencer par la chaîne phare du service public, France 2.
Rugby, inauguration présidentielle d’un pont à Bordeaux, et un long sujet sur le violon de l’orchestre du Titanic, enfin retrouvé on ne sait où : pas un mot sur le sujet, alors que mille questions se posaient. Ce Delahousse ! Il serait capable de voir une guerre mondiale débuter sous ses yeux sans cesser de nous sourire jusqu’au fond des yeux, si ce n’est pas prévu à l’agenda. Ce doit être une grande qualité.
Beaucoup seront tentés d’expliquer ce silence par un refus d’affoler les téléspectateurs. Si seulement c’était l’explication ! On pourrait alors discuter de toute une série de questions nécessaires : comment, en effet, informer sans affoler ? A partir de quand la volonté de prendre son temps bascule-t-elle en pur et simple délit d’initiés ? Mais pour être machiavélique, encore faut-il avoir un cerveau. Chypre, c’est loin. C’est petit. Tout petit. Ce ne peut pas être sérieux, tout au moins pas aussi sérieux que le violon du Titanic. Pour l’apocalypse, repassez lundi.
Daniel Schneidermann 

 

Dernière heure (ajout du 17 mars à 23h30)

Tard, dans la soirée, on apprenait d’une part que le gouvernement chypriote cherchait à renégocier l’accord avec Bruxelles devant l’ampleur des protestations que celui-ci avait provoqué, et que certaines sources, en Allemagne mais aussi à la BCE, envisageaient d’appliquer cette méthode de la confiscations des dépôts à l’Italie et à l’Espagne.
 La première proposition fait sens, à la condition qu’elle n’entraîne pas un taux de confiscation supérieur à 12% pour les tranches de dépôts les plus élevés. Compte tenu de la structure des dépôts dans les banques chypriotes, il est actuellement difficile de dire si une solution allant dans ce sens pourra être trouvée. 

La seconde idée est elle une folie pure. Commencer à évoquer la possibilité d’une confiscation fiscale de l’ordre de 15% sur les dépôts en Italie est exactement ce qu’il faut pour provoquer dès demain un bank run massif dans la péninsule. Quels que soient les démentis qui seront apportés, il est à craindre que le mal ne soit déjà fait car l’information circule actuellement très vite sur les réseaux sociaux (Twitter et Facebook). Nous avons ici la preuve de l’inconscience des bureaucrates de Berlin, Francfort et Bruxelles. 
Audiard faisait dire à un de ses personnage dans le cultissime Les Tontons Flingueurs “Ah, le con, il a osé”. Mais à ce rythme, à Bruxelles, Francfort et ailleurs nous aurons bientôt les tontons flingués !


 

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